LA LETTRE DU MUSICIEN : De l'insolite en musique
Est-ce un hasard ? Plusieurs manifestations en marge des habitudes viennent, ces dernières semaines, d’esquisser un nouveau paysage de l’imagination musicale d’aujourd’hui, comme si, loin des débats académiques et médiatiques, quelque chose de vivant était en train de s’inventer.
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Clic. Est-ce de la danse, du théâtre musical, du concert mis en scène ? Il y a un compositeur qui danse, Jacques Rebotier, un chorégraphe qui parle, Georges Appaix, deux danseuses qui chantent, et une percussionniste qui joue et danse. Ce doit être un ballet. Voire ! Un ludique ballet de ludions, alors, qui engage les corps dans un jeu étrange de gestes virtuoses et quotidiens, avec une musique qui est le spectacle même, musique des mots, des mots de la vie quotidienne, ou même d’une percussionnistes-actrice. Au cours du même spectacle, on pouvait entendre l’un des œuvres les mieux connues de Rebotier, P(l)ages, où les inflexions du récitant se projettent sur les quatre instruments avec lesquelles elle tisse un fascinant contrepoint, et quelques-unes de 66 brèves, pièces ironiques et minimalistes pour instruments et instrumentistes variés et parfois saugrenus (trompette marine, étui, balais, cor des Alpes), qui supposent, de la part de l’instrumentiste, une attitude théâtrale. Jacques Rebotier aurait pu faire comme otut un chacun de la « musique contemporaine », mais il a choisi d’explorer les marges du son, du geste et de la langue. Ce faisant, il trouve en souriant des issues de secours aux questionnements parfois étouffants de la création musicale d’aujourd’hui.
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Jacques Bonnaure
(2ème quinzaine de mars 1995)